Lire et faire lire – Notre prix Gulli du roman

  • Le 2013-06-11

Alexandre Jardin ne m’en voudra sûrement pas d’emprunter à l’association qu’il a cofondée avec Pascal Guénée le titre de ce billet qui a pour but de vous raconter l’aventure du prix Gulli du roman 2013 vécue de l’intérieur…

Début février, je tombe, je ne sais plus comment, sur l’annonce de cet appel à candidature par la chaîne de télévision jeunesse Gulli pour participer à la deuxième édition de son prix littéraire jeunesse.

L’idée : constituer un jury de dix familles – un enfant de 9 à 12 ans et un membre de sa famille  –, leur confier la lecture des sept livres de la sélection, les réunir autour d’un repas délibératoire animé par un président de jury reconnu dans le monde littéraire, leur confier la tâche d’élire le meilleur roman parmi les sept et ainsi lui offrir le titre de prix Gulli du roman 2013.

Le président de cette deuxième édition : un certain... Alexandre Jardin ! Ah ! Fanfan, L’Île des Gauchers… De très bons souvenirs pour maman !

La marche à suivre : une fiche d’inscription à remplir et une critique littéraire à écrire sur le livre de son choix par les deux membres de la famille.

J’ai donc proposé à ma dévoreuse de livres maison, âgée de 10 ans (quelle heureuse coïncidence !) et déjà inscrite au prix des Incorruptibles cette année (une autre expérience littéraire, plus modeste), de nous inscrire toutes les deux.

Pourquoi ? Parce que les livres, ce ne sont pas que des histoires à dévorer tel un boulimique qui oublie d’apprécier sa nourriture.

Les livres, c’est le plaisir des mots et de l’écriture, le pouvoir de passionner, enseigner, émouvoir, troubler, révolter, épouvanter, avec de l’encre et du papier.

Les livres, c’est se divertir, apprendre, mais c’est aussi partager ses émotions en en parlant, en conseillant ses coups de cœur à ses proches.

Les livres, ce sont des auteurs qui y donnent beaucoup d’eux-mêmes et tout plein d’autres métiers qui gravitent autour.

Les livres, c’est un monde à plusieurs portes d’entrée.

Participer à un prix littéraire, c’est lire et juger, exprimer son avis, ses ressentis, savoir dire pourquoi on aime, pourquoi on déteste, faire un choix, défendre son choix. Tout cela est une porte d’entrée dans le monde des livres, différente de celle de la bibliothèque municipale, de la librairie, ou de l’école, c’est une petite porte discrète et confidentielle par laquelle j’ai pensé quil serait chouette d’entrer avec ma fille, à deux, complices et solidaires.

Ma dévoreuse boulimique a dit oui pour tenter de pousser cette petite porte.

Alors elle a choisi – parce qu’elle avait « des choses à dire dessus » – Le Bébé tombé du train* pour notre critique-candidature. Nous l’avons (re)lu chacune de notre côté, nous lavons « critiqué » chacune avec ses mots, puis enfin nous lavons lu ensemble et en avons discuté. Parce que ce nest pas un livre comme les autres. Il y a effectivement beaucoup à dire sur ce petit livre jaune et noir. 

Enfin, j’ai prévenu ma dévoreuse que tout cela nétait quun jeu, et que nous ne gagnerions certainement pas. L’année précédente, cinq cents familles avaient postulé… Mais cela aura déjà été une petite expérience en soi de parler livres toutes les deux.

Oui, mais voilà que, quelques semaines plus tard, je reçois un appel téléphonique m’informant que nous étions sélectionnées… parmi les six cents candidatures de l’année !!

Incroyable mais vrai, nous voilà embarquées dans cette improbable aventure télévisio-littéraire.

Puis, nouvel appel. Nous avons été choisies pour une interview à domicile en vue de présenter le prix Gulli dans le petit journal quotidien de la chaîne, le GulliMag… Cest le côté télévisio de laventure littéraire, anecdotique mais mémorable !

Mais le gros du travail nous attend avec les sept romans à lire et les sept fiches de lecture à remplir ! Deux mois pour tout faire, pas une mince affaire ! Lire, facile ! Écrire, pas facile ! Pas facile d’exprimer ses ressentis, pas facile de mettre des mots sur ce qui nous a passionnées, ou au contraire ennuyées. Osera-t-on faire une critique négative ? Pourquoi a-t-on aimé ? Que dire du style ? Le thème est-il désuet ? Au terme de beaucoup de discussions, nous avons réussi à « boucler » nos fiches. Hop ! Fiches envoyées ! Nous, soulagées !

En attendant le grand jour, je lis Des gens très bien, lavant-dernier livre dAlexandre Jardin. Différent des autres, poignant, touchant, émouvant, dérangeant..., tout cela avec de lencre, du papier et une belle part de lâme de lauteur...

Mercredi 5 juin, 12 h 00, le Grand Palais, le grand jour. Nous y sommes. 

img-3372-1.jpg

Au programme, déjeuner délibératoire en compagnie de toutes les familles, du président et des organisateurs, discussions, découverte de la variété des avis : nos coups de cœur ne sont pas tous partagés… Une consigne par le président très investi dans sa mission : « Votez pour le livre le mieux à même de plaire aux enfants qui n’aiment pas lire. Nous devons en faire un best-seller ! » Quelqu’un dit : « Mais nous ne sommes pas bons jurys pour cela ! Il aurait fallu sélectionner des enfants qui détestent lire ! Ici, nous n’avons que des dévoreurs ! » Pas faux ! Mais nous prenons notre mission à cœur, nous aussi. Deux tours de votes, un élu.

Présentation à la presse, remise du prix à l’heureuse lauréate, photographies et signatures d’autographes par plusieurs des auteurs, autour d’un cocktail. Comme il est sympathique, ce côté-là du monde des livres !

Alexandre Jardin et Évelyne Brisou-Pellen (photo Sophie Viguier©)

41tqck5w9jl-sl160.jpg

Grand gagnant du prix Gulli du roman 2013 : Le Manoir, dÉvelyne Brisou-Pellen, Bayard jeunesse

Lhistoire : Un adolescent rescapé du cancer rentre en convalescence dans un manoir bien étrange, où la vie semble avoir pris quelques dizaines d’années de retard. Les autres pensionnaires ont des mœurs énigmatiques, l’atmosphère tout comme le parc avoisinant ont un « je-ne-sais-quoi » d’anormal. Liam va pourtant trouver sa place dans ce drôle d’environnement, une place bien étrange, elle aussi...

Ainsi, nous sommes entrées par une petite porte, nous avons lu, nous avons discuté en famille, nous avons rempli des fiches, nous avons rencontré, nous avons mangé, nous avons discuté en familleS, nous avons voté, nous avons élu…
Ça y est, notre mission Gulli est désormais terminée.

C’est une très belle aventure qui s’achève pour ma dévoreuse d’histoires et moi-même, ludique, studieuse, porteuse d’enseignements, inoubliable !

Lannée prochaine, si vous avez un ou une dévoreuse de 9-12 ans à la maison, tentez laventure !

En attendant, et pour tous, lisez et faites lire Le Manoir, dÉvelyne Brisou-Pellen, aux éditions Bayard jeunesse. Un petit pavé quand même, mais capable de captiver vos enfants, quils soient lecteurs boulimiques ou timides, et vous-même, je vous le garantis ! Vous en redemanderez, vous verrez.

 

*de Jo Hoestlandt, chez Oskar jeunesse, justement dans la sélection du prix des Incos 2013.

 
  • 2 votes. Moyenne 3 sur 5.